PROJECTION (59 Min) : MIDI-MINUIT FANTASTIQUE / DRUILLET AVEC UN “D“ COMME DRACULA
Dracula de Jean Boullet (1963 / 9 min)
Peu après sa rupture avec Midi-Minuit Fantastique fin 1962, Jean Boullet se lance dans le projet fou d’une adaptation en ombres chinoises de Dracula. Entouré de Philippe Druillet et de Boris Bergman, qui font là leurs premiers pas artistiques, il va donner corps, deux ans durant, à sa vision toute personnelle du mythe, entre fascination pour l’homo-érotisme, désir de renouer avec la préhistoire du cinéma et identification manifeste à son héros. En résultent des images sublimes, parfois dans l’héritage de Cocteau, et qui toujours tiennent de l’invocation magique. Le film restera inachevé mais, pour la première fois, un montage des rushs ayant survécu est présenté. L’occasion de revivre les sanglantes aventures de Jonathan Harker au château du seigneur des vampires… Montage fait à partir de rushs numérisés en définition standard (Soft-Prod/Stanzick, 2018). Très curieux court-métrage d’animation reconstitué par Nicolas et Erwan le Gac à l’aide de photos retrouvées chez un collectionneur. Boullet présentait des animations, des ombres fantômes, à la Cinémathèque française durant l’époque d’Henri Langlois.
Mai 1962. Les kiosques à journaux affichent la photo saisissante d’un loup-garou aux prises avec une voluptueuse jeune femme. En lettres noires et rouge sang brille pour la première fois un nom appelé à la postérité : Midi-Minuit Fantastique. Tout au long des Sixties, ces trois mots magiques résonnent comme la plus intense des promesses… Fondée par Michel Caen, Alain Le Bris, Jean-Claude Romer et Jean Boullet, la toute première revue européenne consacrée au cinéma de genre ne se contente pas de défricher un domaine alors méconnu et méprisé. En dix ans d’existence et vingt-quatre numéros, MMF s’impose comme une publication à la fois ludique et exigeante, foisonnante et avant-gardiste. En un mot : culte. Sa rédaction fédère de brillants spécialistes : Raymond Borde, Claude Beylie, Bernard Eisenschitz… De prestigieuses plumes d’horizons divers s’invitent ponctuellement dans ses colonnes : Philippe Druillet, Roland Topor, Ado Kyrou, Domenico Paolella… Le ton est libertaire, les racines populaires, l’inspiration surréaliste. L’iconographie de sexe et de sang, éminemment évocatrice. Un seul credo : le fantastique est l’autre nom de l’érotisme. MMF saisit en temps réel un âge d’or du 7e art et accouche d’une subversive « politique des horreurs ». La Hammer, le gothique italien, l’épouvante américaine sont à l’honneur. Dracula et Peeping Tom deviennent les héros noirs d’une contre-culture qui annonce mai 1968 et la libération sexuelle. Cinéma bis, cinéma d’auteur, underground, littérature et BD s’entremêlent dans un enthousiasmant maelström pop…
Jean Boullet, le Montreur d’ombres de Nicolas Stanzick et Erwan Le Gac (2018 / 50 min)
“Le documentaire comporte de nombreux documents de première main, parfois inédits, et des témoignages de Michel Caen, Jean-Claude Romer, Jean -Pierre Bouyxou, Alain Venisse, Jean-Claude Michel, Boris Bergman, Philippe Druillet, François Angelier. Intéressante remarque de Bergman sur la mort de Boullet, reproduisant peut-être la mort du protagoniste de la classique nouvelle fantastique de Bram Stoker, La Maison du juge. Séduisante hypothèse que Bergman étaye sur le fait que Boullet admirait Stoker. Témoignages (de Michel, Bergman et Druillet) sur la cinéphilie Hammer de Boullet etsur le désert français en matière de cinéma fantastique à la fin des années 1950. Du coup, les cinéphiles voyageaient à Londres ou à Bruxelles (Roland Lethem y découvre Barrière de chair – 1964 de Kyonori / Seijun Suzuki et fait ensuite part de sa découverte à MMF mais il faudra attendre 1990 environ pour que le film sorte effectivement en exploitation commerciale normale à Paris.”