Edito 2023
ÉDITO • Laurent Chollet, Directeur général de Sound of Silent
Si la France demeure l’un des pays les plus richement dotés au monde en festivals de cinéma thématisés, et particulièrement en festivals patrimoniaux, le pays qui a inventé le cinématographe et dominé la production mondiale jusqu’en 1913 ne possédait curieusement aucune manifestation d’envergure dédiée aux 35 premières années du cinéma, celles du cinéma « sans paroles », qui consacra tant de stars de par le monde et produisit tant de chef-d’œuvres.
Un manque que Chartres s’apprête à combler du mardi 30 mai au dimanche 4 juin prochains, avec la première édition de Sound of Silent, le Festival International du Film Muet de Chartres.
Chartres où Jean Vigo passa quelques années comme pensionnaire au Lycée Marceau : ce qui lui inspira plus tard son film Zéro de conduite.
Chartres sera donc l’écrin de ce nouveau festival.
Six jours intenses : 150 séances de cinéma, plus de 200 films, une trentaine de ciné-concerts, et une quarantaine de rencontres et tables rondes, en accès libre et gratuit, une centaine d’intervenants : professionnels du cinéma, historiens, écrivains et spécialistes divers.
Figure iconique de la Pop Culture s’il en est, Jean-Pierre Dionnet est le Président d’honneur de la première édition de ce festival.
Kyle Eastwood en est le Parrain. Kyle Eastwood qui présentera au Théâtre de Chartres, le 2 juin, Eastwood by Eastwood, l’hommage musical à son père, présenté pour la première fois avec son Quintet jazz.
Doyen de la critique de cinéma, pilier de la mythique revue Positif, Michel Ciment en est l’invité d’honneur. Quentin Tarantino aime à dire de lui : « Tant que le cinéma a Michel Ciment, le cinéma va bien ».
Jacques Richard viendra présenter son film muet et en noir et blanc, Rebelote, réalisé en 1982 avec Jean-Pierre Léaud et Garielle Lazure, projeté dans une superbe copie 35 mm, ainsi que son documentaire fleuve Le Fantôme d’Henri Langlois, devenu très rare depuis sa sélection au Festival de Cannes en 2004.
Jacques Richard viendra présenter son film muet et en noir et blanc, Rebelote, réalisé en 1982 avec Jean-Pierre Léaud et Garielle Lazure, projeté dans une superbe copie 35 mm, ainsi que son documentaire fleuve Le Fantôme d’Henri Langlois, devenu très rare depuis sa sélection au Festival de Cannes en 2004.
Lyon et les Lyonnais seront particulièrement mis à l’honneur, à Chartres, au cours de la cérémonie d’ouverture, le mardi 30 mai, à partir de 18h00 au Théâtre de Chartres, là même où a eu lieu le 17 mai 1896 la première séance Lumière, avant que le public ne découvre au cinéma Les Enfants du Paradis, Dans la nuit de Charles Vanel, le dernier film muet français, grand chef-d’œuvre oublié, éclipsé par l’arrivée du parlant, invisible pendant des dizaines d’années, avant d’être restauré.
Le dernier film muet français en ouverture du premier grand festival entièrement dédié au cinéma muet en France : tout un symbole, rendu possible grâce à Thierry Frémaux et à l’équipe de l’Institut Lumière.
Un ciné-concert événement avec le pianiste Jean-Michel Bossini.
Six jours au cours desquels, on célèbrera notamment les 100 ans du premier studio Disney, les 100 de Warner Bros., mais aussi le cinéma expressionniste allemand, l’âge d’or du cinéma muet italien, Alice Guy, Musidora, Antonin Artaud, John Ford, la période hongroise de Mihály Kertész – le futur Michael Curtiz, réalisateur à Hollywood notamment de Casablanca –, ou bien encore Vincenzo Leone, alias Roberto Roberti, réalisateur en 1913 du premier western italien et qui n’est autre que le père de Sergio Leone, au sein du cinéma Les Enfants du Paradis, dont le festival occupera 5 des 11 salles, de 9h00 à minuit, du 30 mai au 4 juin.
Festival de diffusion, le Festival International du Film Muet de Chartres permettra de découvrir plus de 200 films restaurés, à travers des rétrospectives, des intégrale et des hommages, sous la houlette des meilleurs curateurs et curatrices : Stefano Della Casa et Matteo Pallone, Céline Gailleurd et Olivier Bohler, Laurence Meiffret et Armel de Lorme, György Ràduly, Gilles Ciment… ou bien encore Nicolas Stanzick.
L’occasion de voir d’innombrables raretés, issues d’une quarantaine de cinémathèques et d’institutions du monde entier, dont Too Much Johnson (1938) – l’authentique premier long-métrage d’Orson Welles, réalisé un an avant Citizen Kane –, perdu jusqu’en 2013, ou The Gold Diggers (1923) de Harry Beaumont, l’un des tous premiers films produit par Warner Bros, lui aussi perdu, avant d’être retrouvé en 2021 puis restauré.
Sound of Silent réunira des personnalités du monde du cinéma, du théâtre, de la littérature, de la bande dessinée… et de la musique puisque, contrairement aux idées reçues, le « cinéma muet » n’a jamais été silencieux.
Sous la direction artistique de Karine Bey, la programmation du Festival International du Film Muet de Chartres permettra de (re)découvrir que le cinéma fut, des décennies durant, indissociable de la musique et du spectacle vivant, et que chaque séance de projection était, à cet égard, unique.
Sound of Silent sera donc un festival de cinéma où la musique – sous toutes ses formes (classique, jazz, rock, rap, électro…) – sera omniprésente.
Festival de création, le Festival International du Film Muet de Chartres le sera notamment via la trentaine de ciné-concerts présentés.
Ces créations, 100% inédites et créées à notre invitation, ne seront jouées qu’une et une seule fois, dans le cadre précisément de ce festival.
Sous la direction musicale et artistique de Sébastien Damiani – qui a créé la signature musicale du festival et avec Akhénaton (du groupe IAM) le générique musical de Sound of Silent –, offrira 4 ciné-concerts événements les 31 mai, 1er juin, 2 juin et 3 juin avec notamment Guo Gan, le maître chinois du erhu, ou le comédien Philippe Caubère, inoubliable Molière chez Ariane Mnouchkine ou Joseph Pagnol devant la caméra d’Yves Robert.
En ayant convié sur scène Faf Laraf et Shurik’n (du groupe IAM) à accompagner deux chef-d’œuvres du cinéma muet, Sébastien Damiani offrira les premiers ciné-concerts jamais présentés au monde, associant le hip hop et le cinéma muet.
Sous la direction musicale et artistique de Benjamin Moussay, le public pourra (re)découvrir 4 des premiers films de Jean Renoir en ciné-concert, en version restaurée et en avant-première mondiale, accompagnés par Benjamin Moussay, seul, ou avec ses complices Airelle Besson, Yonnel Diaz et Christophe Lavergne.
Quant à Jean-François Zygel, outre les meilleurs de ses élèves issus de sa classe d’improvisation au piano du Conservatoire de Paris (CNSMDP), présents à Chartres pour une série de ciné-concerts, il jouera lui-même à plusieurs occasions, et offrira également le dimanche 4 juin, une rencontre, publique et gratuite, aux Enfants du Paradis : Comment accompagner au piano le cinéma muet.
La Médiathèque l’Apostrophe présentera une exposition des dessins de Catel Müller, illustrant la vie d’Alice Guy : la première femme réalisatrice. Alice Guy, dont Catel et son scénariste José-Louis Bocquet raconteront l’itinéraire à travers un ciné-concert le dimanche 4 juin.
Grâce à sa biographe Laurence Meiffret, la Résidence Montana accueillera, elle, une exposition consacrée à Génica Athanasiou, comédienne injustement oubliée – surtout célèbre à travers la correspondance amoureuse adressée par Antonin Artaud, son compagnon de 1922 à 1927 – au parcours artistique tout à fait extraordinaire.
A cela s’ajoutera, le dimanche 4 juin, à 15h00, au OFF, la pièce de théâtre La Performance avec Emmanuelle Laborit et Ramesh Meyyappan, un hommage au cinéma muet et au film culte de Marcel Carné Les Enfants du Paradis.
Installé au sein du cinéma Les Enfants du Paradis, avec nos partenaires L’Esperluète et BD Flash, le Village du festival proposera un vaste choix de livres, BD, revues, DVD, Blu-Ray et goodies. Avec, en prime, de nombreuses séances de dédicace.
Décerné le dernier jour du festival, le Prix Sound of Silent mettra chaque année à l’honneur des personnalités qui œuvrent sans relâche pour la conservation du patrimoine cinématographique et la transmission de la mémoire du 7ème art.
Pour l’équipe de Sound of Silent, il convenait de mettre en avant un savoir-faire emblématique de Chartres, capitale du vitrail, connu pour sa Cathédrale et le « bleu » de ses vitraux. Un art qui de surcroît fait écho au principe fondamental de la projection… la révélation des images par la lumière !
Anna Loire est la créatrice du trophée du Prix 2023.
Le Prix Sound of Silent 2023 sera remis au Théâtre de Chartres, le dimanche 4 juin 2023, à Sophie Seydoux, Présidente de la Fondation Jérôme Seydoux-Pathé, au cours de la cérémonie de clôture de la première édition du Festival International du Film Muet de Chartres.
La Fondation Jérôme Seydoux-Pathé, à laquelle le festival Sound of Silent rendra hommage cette année, à travers de nombreux chef-d’œuvres du cinéma, projetés en version restaurée, dont en film de clôture, La Femme et le pantin (1919) de Jacques de Baroncelli : un ciné-concert événement avec une musique improvisée au piano par Jean-François Zygel.
La transmission de la mémoire se trouve au cœur de l’ADN de Sound of Silent.
Bon festival !
ÉDITO • Karine Bey, Directrice Artistique de Sound of Silent
Comme le dit Akhenaton dans le générique du Festival Sound of Silent, notre « petite pièce devient immense » grâce aux arts, ici la musique, l’écriture et le cinéma, armes d’imagination, d’évasion et de prises de liberté massives.
Le but du Festival, qui mêle spectacle vivant et cinéma, est d’incarner ce partage à travers des lieux physiques afin de se retrouver tous ensemble autour des premières bobines de cette période si peu classique et déjantée où la vie transparaissait avec une authenticité inégalée.
Pourquoi cet intérêt pour le cinéma muet qui a plus d’un siècle d’existence? Parce qu’il est tout sauf poussiéreux et qu’il offre une poésie des images indispensables en cette période de vacarme et de guerre des mots. Parce qu’il nous offre une respiration dans un monde en crise et qu’il nous donne des clefs de réflexion.
Partager ensemble ces émotions était primordial après les deux années de Covid. Les salles de cinéma, comme les théâtres, sont les sanctuaires des rêves partagés où des personnes qui ne se connaissent pas peuvent vivre ensemble des émotions au même instant. Le but du festival est ce partage avec le plus grand nombre d’œuvres de cultures différentes et des premiers gestes cinématographiques qui peuvent aujourd’hui être sources d’inspiration pour les plus jeunes, loin de la standardisation. Les premiers acteurs du cinéma étant issus du théâtre, de l’opéra, du cirque, de l’illusion, du vaudeville et de la rue, le cinéma muet propose une matière protéiforme et magique à partager avec le jeune public féru de visions nouvelles et expérimentales.
Il fallait redonner un cœur, trouver un centre névralgique pour célébrer la période dite « silencieuse » du 7e art si peu connue. La ville de Chartres nous a ouvert ses bras.